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Un mardi en poésie : Le Château de l'Espérance

Chaque mardi, rendez-vous sur le site internet du musée pour découvrir une nouvelle chronique sur Stéphane Mallarmé. Cette semaine, focus sur le poème « Le Château de l'Espérance », publié vingt ans après la disparition du poète.

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À partir du milieu des années 1880, tous les mardis soirs, Stéphane Mallarmé reçoit des hommes de lettres et des artistes, surnommés les « mardistes ». Pour rendre hommage à ces célèbres soirées, nous vous donnons rendez-vous chaque mardi sur le site internet du musée pour découvrir une chronique inédite sur le prince des poètes.

Les origines du poème

Depuis Londres où il réside, Stéphane Mallarmé fait parvenir deux poèmes à son ami Henri Cazalis, Les Fenêtres et L’Assaut, dans une lettre datée du 3 juin 1863 :

« J’ai fait sur ces idées un petit poème Les Fenêtres, je te l’envoie ; et un autre L’Assaut qui est vague et frêle comme une rêverie. D’une chevelure qui a fait naître en mon cerveau l’idée d’un drapeau, mon cœur, pris d’une ardeur militaire, s’élance à travers d’affreux paysages et va assiéger le Château fort de l’Espérance pour y planter cet étendard d’or fin. Mais, l’insensé, après ce court moment de folie, aperçoit l’Espérance qui n’est qu’une sorte de spectre voilé et stérile. »

Le premier poème sera publié dans le Parnasse contemporain en 1866 à l’inverse du second texte renommé Le Château de l’Espérance.

 

Un poème refusé par le Parnasse 

Le 1er novembre 1865, Catulle Mendès avait exhorté Mallarmé à lui envoyer des vers pour la publication de la première revue du Parnasse contemporain : « Vite, envoyez-moi vos vers. Tâchez de dépasser quatre cent vers. [...] [Il s'agit] du Parnasse contemporain où je suis maître, magnifique impression. Tous les bons poètes contemporains et nouveaux. J'attends vos vers et l'imprimeur aussi. » 

Six mois plus tard, Mallarmé lui fait parvenir une sélection de treize poésies dont dix seront sélectionnées pour intégrer le recueil : « Mon cher Catulle, Vous avez maintenant mon treizan de Poèmes, et vous me pardonnerez mon retard n'est-ce pas ? Ce serait mal à vous de ne pas le faire, car toutes ces veillées de la semaine, et les nuits des deux derniers jours, ont été consacrées à rendre ces vers présentables. [...] Amitiés à tous mes chers amis que je ne nomme pas pour ne pas mettre l'un avant l'autre. Ne m'oubliez pas auprès de Banville. Mes meilleurs souvenirs à Monsieur et Madame de Lisle. » (Lettre à Catulle Mendès, fin avril 1866).

Cette première édition compile des œuvres d’une quarantaine de poètes de l’époque dont Charles Baudelaire, Théodore de Banville, François Coppée, Théophile Gautier, Leconte de Lisle, Sully Prudhomme ou encore Paul Verlaine. Après sa parution, le nom de « parnassien » utilisé d’abord ironiquement par les détracteurs, est rapidement adopté pour qualifier ces poètes unis autour du concept de « l'Art pour l'art », théorisé par Théophile Gautier, qui voit dans la beauté la seule fin de l'art.

Cette parution permet à Mallarmé d’avoir une première reconnaissance et de se rapprocher des principaux écrivains du Parnasse avec qui il confronte ses idées. Il admire particulièrement Théodore de Banville et se lie avec Villiers de l’Isle-Adam et Paul Verlaine, qui resteront de proches amis.

Liste des poèmes publiés

  • Les Fenêtres
  • Le Sonneur,
  • À celle qui est tranquille,
  • Vere novo, L’Azur,
  • Les Fleurs,
  • Soupir,
  • Brise marine,
  • À un pauvre
  • Épilogue

Une publication posthume 

Concernant le Parnasse, ce n’est qu’en 1875 que le poète décide de s’éloigner du groupe alors que la publication de son poème Improvisation d’un Faune fait également l’objet d’un refus.

Le Château de l'Espérance demeura quant à lui inédit du vivant du poète, il sera publié pour la première fois par le beau-fils de Mallarmé, Edmond Bonniot, dans la revue Littérature en 1919. Cependant des manuscrits originaux de ce poème ont été retrouvés et depuis conservés à la Bibliothèque littéraire Jacques Doucet.

 

Ta pâle chevelure ondoie
Parmi les parfums de ta peau
Comme folâtre un blanc drapeau
Dont la soie au soleil blondoie.

Las de battre dans les sanglots
L’air d’un tambour que l’eau défonce,
Mon cœur à son passé renonce
Et, déroulant ta tresse en flots,

Marche à l’assaut, monte, – ou roule ivre
Par des marais de sang, afin
De planter ce drapeau d’or fin
Sur ce sombre château de cuivre

– Où, larmoyant de nonchaloir,
L’Espérance rebrousse et lisse
Sans qu’un astre pâle jaillisse
La Nuit noire comme un chat noir.

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