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Un mardi avec Mallarmé : c'est la rentrée !

La rentrée sonne le retour des mardis avec Mallarmé sur le site du musée !
Cette semaine, focus sur le premier recueil du poète rédigé à la main dans son cahier de lycéen.

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Entre 1859 et 1860, le jeune Stéphane, alors lycéen à Sens, compose ses premiers poèmes influencés par Victor Hugo, Alfred de Musset ou encore Alphonse de Lamartine, qu'il rédige à la main et regroupe dans un cahier qui deviendra son premier recueil intitulé Entre quatre murs. Rien de tel qu'une sélection de ses plus beaux poèmes d'adolescent pour débuter la rentrée en douceur et en poésie !

Billet du matin

La nuit tord sur les prés ses cheveux pleins d'étoiles,
Et la rosée épanche en tombant de leurs voiles,
Aux lilas sa senteur, sa fraîcheur à l'oiseau,
- La nuit tord sur les prés ses cheveux pleins d'étoiles,
Toi, relève les tiens d'un souple et vert roseau.

On voit fuir par l'azur la lune vague et blanche,
Comme une fée, en l'eau qui mire la pervenche.
Le nid fait sa prière et tout va s'empourprer...
- Vois glisser dans l'azur la lune molle et blanche,
- Un astre fuit, Mignonne, à toi de te montrer !

La rose aime le lys, - tous deux aiment Mignonne
La violette semble en la mousse une nonne,
Le grillon, franc luron, frappe à sa feuille en pleurs...
- La rose aime le lys, tous deux aiment Mignonne

Ballade

J'aime une fille bohème
Au pied leste et fin :
Je la vis sous un roc blême
Qui sortait du bain
Dessous ses tresses d'ébène,
Noires ailes de corbeau,
Brillait un œil aussi beau
Que la lune pleine !

L'eau ruisselait sur son sein,
Fleur sous la rosée!
Sur son genou purpurin
L'algue est renversée...
Là, muette et souriant
Tu contemplais sur la lame
Ton frais minois, rose femme,
Que berçait le vent!

Depuis mon cœur est de flamme !
Dans mon rêve au soir
Je vois le sein de ma dame
Effleurer l'air noir !

Adieu !

Noirs autans. Ah ! cessez de souffler la tempête
Et d'enfanter les pleurs ! Qu'un ciel limpide et pur
De l'aurore au couchant s'étende sur sa tête
Que l'onde à ses pieds soit d'azur !

En murmurant son nom que la vague se brise!
Et que, resplendissant des derniers feux du jour,
Le flot s'unisse au flot et la brise à la brise
Pour bercer ses rêves d'amour !

Et toi, rapide nef, qui quittes ce rivage
Où la lame écumante au chant de ma douleur
Mêle sa voix plaintive, ô douloureuse image
De l'espoir qu'a vu fuir mon cœur ! 

On donne ce qu'on a

Le riche au pauvre, au froid automne,
Jette l'or où brille l'espoir
Le mendiant lui fait l'aumône
Avec sa prière du soir !
L'Aube de sa paupière rose
Sur l'églantier épand ses pleurs
L'églantier donne à l'aube éclose
Ses chants d'oiseau et ses senteurs !

Au goëland rasant l'écume
La vague offre un nid de corail
L'oiseau laisse une blanche plume
Au flot que fend son bec d'émail.
Le peu qu'il a chacun le donne !
Enfant, c'est un baiser rieur
Amant, des lilas en couronne
Poëte, un écho de son cœur !

Voir aussi

Aujourd'hui conservé à la Bibliothèque littéraire Jacques Doucet, l'ouvrage regroupe une cinquantaine de textes numérisés !