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Un mardi avec Picasso : les portraits de Mallarmé

Jean Angladon, Stéphane Mallarmé, 1956, tirage d’un bois gravé d’après une sanguine originale de Picasso de 1948, Musée Stéphane Mallarmé © Yvan Bourhis
Chaque mardi, rendez-vous sur le site internet du musée pour découvrir une nouvelle chronique sur le poète.
Cette semaine, nous vous proposons de découvrir les portraits de Mallarmé réalisés par Picasso.

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À partir du milieu des années 1880, tous les mardis soirs, Stéphane Mallarmé reçoit des hommes de lettres et des artistes, surnommés les « mardistes ». Pour rendre hommage à ces célèbres soirées, nous vous donnons rendez-vous chaque mardi sur le site internet du musée pour découvrir une chronique inédite sur le prince des poètes.

Picasso et la poésie

Pablo Picasso voue une admiration à la poésie française dès ses premiers séjours à Paris au début du 20e siècle et se rend notamment aux récitations de poèmes organisées chaque mardi à la Closerie des Lilas. Il est d'ailleurs fasciné par les poètes du 19e siècle, Paul Verlaine surtout, mais aussi Charles Baudelaire et Stéphane Mallarmé.

À partir de 1935 et jusqu’en 1959, l'artiste s’exerce même à l’écriture poétique et se lie d’amitié avec les plus grands poètes de son temps : Paul Éluard, Guillaume Apollinaire, Raymond Queneau, Jean Cocteau ou encore Michel Leiris. Pendant presque 25 ans, Picasso écrit ainsi plus de trois cents poèmes, en français ou en espagnol, dont les manuscrits sont pour la plupart conservés au Musée national Picasso-Paris.

 

Les portraits de Mallarmé

Ces poètes inspirent également l'œuvre de Picasso qui réalise le portrait de nombre d'entre eux dont Verlaine, Apollinaire et bien sûr Stéphane Mallarmé.

Selon Pierre Daix, écrivain et historien de l'art français : « Picasso éprouvait un grand respect pour ce qu’il savait de l’homme, de son intransigeance et de son refus des concessions touchant son œuvre, voyant en lui un symbole du poète. C’est sûrement dans cet esprit qu’il a exécuté son portrait. » 

Il existe quatre portraits connus de Mallarmé par Picasso, tous exécutés durant les années 1940. Pour ces œuvres, l'artiste prend pour modèle le portrait de Mallarmé réalisé par Paul Gauguin en 1891. 

Comme Gauguin, Picasso représente le poète sous les traits d’un faune, avec les oreilles pointues, faisant ainsi explicitement référence au poème L’ Après-midi d’un faune

Daté de 1943, le premier portrait est un dessin à l'encre aujourd’hui conservé au Musée national d’art moderne mais qui fut offert à l'origine à Michel Leiris.

Au verso du dessin apparaît en effet la mention : « pour Michel Leiris, son ami Picasso, le 20 avril 1943 », montrant la complicité entre les deux hommes.

Daté du 25 avril 1945, le second portrait est également un dessin à l’encre mais celui-ci se distingue par son remarquable jeu d’ombre et de lumière et par l'ajout d'un texte manuscrit de l'artiste qui reprend le sonnet mallarméen Le Tombeau d'Edgar Poe, « Tel qu’en lui-même enfin l’éternité le change », en imitant la signature du poète américain. 

 

Le troisième portrait

Le 5 juin de la même année, Picasso dessine sur un carnet la figure de Mallarmé face à celle de Verlaine. Ce livre appartenait à Paul Éluard comme en témoigne une photographie conservée au musée national Picasso montrant les portraits de Verlaine et de Mallarmé sur ce même cahier.

Les portraits des deux poètes ont ensuite été détachés du livre et séparés, au plus tard en 1966 : le portrait de Verlaine se trouve désormais au Metropolitan Museum of Art à New-York, celui de Mallarmé n’est malheureusement plus localisé.

Le dernier portrait est un dessin à la sanguine du 29 juin 1948, immédiatement acheté par Jeanne de Flandreysy, femme de lettres et mécène, pour son Palais du Roure à Avignon : « Je l’ai acheté en 1948, à Tournon dans une vente aux enchères organisée par les amis de Mallarmé qui avaient envoyé une quantité d’objets précieux pour les collectionneurs, afin d’obtenir avec le produit de cette vente les fonds nécessaires à l’achat d’une plaque commémorative du passage du poète dans la petite ville rhodanienne. Picasso, sollicité, avait dessiné ce nouveau portrait qui, achevé le matin même et envoyé par exprès, était déjà le soir en ma possession, au grand regret d’ailleurs du conservateur du Musée de Tournon. »

Le musée Stéphane Mallarmé détient un tirage d’un bois gravé de Jean Angladon réalisé en 1956 d’après la sanguine originale toujours conservée à Avignon. Comme Picasso, Raoul Dufy offrit une œuvre destinée à être vendue afin de financer un médaillon du poète pour célébrer le cinquantenaire de sa disparition.

Voir aussi

(Re)découvrez le Portrait de Stéphane Mallarmé par Édouard Manet !